LA FASHION A DEUX VITESSES

LA FASHION A DEUX VITESSES

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En cette saison du Fashion Week, les marques de luxe sont toutes unanimement investit sur les podiums pour dévoiler leurs créations. Ce rendez-vous incontournable des maisons de prêt à porter fait face à un contexte de crise profonde du commerce de détail « retail ». Dans un secteur très compétitif où les barrières à l’entrée sont relativement faibles, les grandes marques doivent sans cesse innover pour se démarquer. Il serait naïf de penser que les marques surfent sur la même vague, les différences entre les stratégies des principaux acteurs se font vite ressentir. En effet, après l’émergence du slow et fast fashion c’est au tour du concept « see now buy now », initié à peine l’an dernier, de scinder davantage le secteur. Intronisé par Burberry, le concept a fait beaucoup d’émules néanmoins certaines marques haut de gamme à l’instar de Tom Ford ont vite abandonné l’initiative ou ont refusé tout simplement de s’y soumettre (Dior, Chanel, Hermès).

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Source : http://bit.ly/2xNEmYm

Dans les coulisses de l’industrie, la distinction entre les marques de prêt à porter est tout autre. il y a une évolution des marques de fashion à deux vitesses qui en font les gagnants et les perdants d’une nouvelle guerre qui semble de plus en plus manifeste. On ne parle pas ici d’une bataille entre fast et slow fashion mais d’un clivage entre les marques qui affichent des niveaux de croissance robustes voir à deux chiffres et ceux dont les ventes sont en net recul et par conséquent doivent se restructurer.

Les gagnants et les perdants

Difficile d’imaginer une telle disparité au sein d’un meme secteur mais les preuves sont là, notamment pour les sociétés cotées qui ont l’obligation de publier leurs comptes financiers trimestriels.

Ainsi, des marques telles qu’Hugo Boss ou Ralph Lauren, qui malgrè leur forte notoriété dans le prêt-à-porter, ont vu leurs ventes se contracter de –4% et –10% respectivement. Il est de meme pour Burberry, pourtant le pioneer en digitalisation de la mode, à afficher un léger recul de son chiffre d’affaires en 2016. A l’inverse, d’autres marques telles que PVH (propriétaire de Calvin Klein, Tommy Hilfiger) ou Moncler affichent de forts taux de croissance positifs.

Nous constatons non seuleument une baisse des ventes mais également une degradation des marges operationnels pour les marques citées ci-dessus. En parrallele, les marques qui voient leurs ventes progresser affichent également une amelioration de leur rentabilité opérationnelle qui s’explique par une capacité à faire passer des augmentation de prix (pricing power) grâce à une identité de marque forte.

La nouvelle guerre du fashion

Quelles sont les techniques des marques de fashion pour faire face à la crise du commerce de détail et aux pratiques de remises élevées ?

Elles doivent tout d’abord apprendre à anticiper les tendances des consommateurs, et ce, grâce à une gestion optimale des stocks pour éviter un décalage entre l’offre et la demande. En effet, la réduction du délai nécessaire entre le temps de fabrication et de commercialisation permet de réduire la probabilité qu’un article se retrouve bradé voir commercialisé en « outlet » car démodé. C’est un cercle vicieux car la baisse de prix est néfaste à l’image d’une marque, impacte directement la rentabilité et diminue la capacité future à vendre des articles au prix fort.

Par ailleurs, les marques doivent scrupuleusement revoir leur politique de distribution auprès des revendeurs « wholesale ». Il fut un temps où le nombre de point de vente était primordial, il est dorénavant plus important que la qualité du revendeur réponde aux exigences des marques en matière d’emplacement, de clientèle et de réputation. Ainsi les marques doivent examiner minutieusement les revendeurs qui sont à la hauteur de leur image de marque car les remises élevées sont souvent issues de magasins qui ne disposent pas de la clientèle approprié et doivent ainsi liquider leur stock en fin de saison.

Enfin, les marques qui savent préserver leur image ont une meilleure capacité à attirer des talents. Nombreux étaient surpris de voir Raf Simons, ancien couturier chez Dior, poser ses bagages chez Calvin Klein. Le succès ne s’est pas fait tarder, la marque américaine vient de publier une croissance de ses ventes de +8% lors du 2ème trimestre 2017.

Un secteur qui séduit les investisseurs

Les sociétés de prêt à porter ont un profil intéressants car elles sont faiblement endettés (net debt / EBITDA en dessous de 4 fois) et ont une forte capacité de génération de cash (au-dessus de 10%). Les marges opérationnelles sont en moyenne dans une fourchette qui se situe entre 15% et 25% et peuvent atteindre jusqu’à 35% pour des marques comme Hermès ou Moncler. La politique de rémunération des investisseurs est intéressante avec un dividende moyen d’environ 2%, voir jusqu’à 4% pour Hugo Boss.

Nous estimons que le secteur devrait continuer à croitre entre +2% et +4% dans les 3 prochaines années. Malgré une industrie du fashion à deux vitesses nous pensons qu’il y a encore des opportunités d’investissement attrayantes, encore faut-il sélectionner les marques qui ont une stratégie gagnante.

Source Image à la Une : http://bit.ly/2xzVFwv

Raffi Balyozyan

Raffi holds a Master in Finance from SKEMA Business School. He began his career as an analyst at JPMorgan followed by an equity research position at Natixis Securities. Since 2010, he has developed considerable expertise in analyzing the luxury sector for the Franck Muller Group as well as advising a luxury investment fund.

All stories by : Raffi Balyozyan

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Raffi Balyozyan

Raffi holds a Master in Finance from SKEMA Business School. He began his career as an analyst at JPMorgan followed by an equity research position at Natixis Securities. Since 2010, he has developed considerable expertise in analyzing the luxury sector for the Franck Muller Group as well as advising a luxury investment fund.

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